Un tournant critique. La Fédération Wallonie-Bruxelles – la Communauté française pour les adeptes de l’appellation constitutionnelle – est à un tournant critique de sa courte histoire. Trois réformes majeures, tout autant qu’indispensables, attendent en effet les grands argentiers du présent gouvernement et de ses successeurs.
Il y a d’abord le Pacte pour un enseignement d’excellence dont la mise en œuvre à marche (presque) forcée creusera le déficit de 162 millions d’euros en 2019. Et dont les effets retours budgétisés à moyen terme seront profondément dépendants de son implémentation complète. Il y a ensuite le refinancement de l’enseignement supérieur réclamé à cor et à cri par les universités et les hautes écoles. Les premières ont fixé la barre très haut : juste pour garder la tête hors de l’eau, il leur faut 150 millions de subventions en plus, chaque année, d’ici la fin de la prochaine législature. C’est trois fois et demie l’effort consenti par ce gouvernement. Il y a enfin la réforme de la formation initiale des enseignants aujourd’hui dans la dernière ligne droite au point de vue législatif.
La dernière ligne droite ? Incontestablement, ce décret est pavé d’excellentes intentions. Il fait en effet le pari d’améliorer considérablement la qualité de notre enseignement – personne aujourd’hui n’oserait en nier la nécessité – en se montrant plus exigeant sur la formation des maîtres. Ce faisant, on alignerait le parcours des futurs instituteurs et régents sur ce qui se fait dans de nombreux pays européens.
Coûteuses réformes
Le pari qu’il ne relève pas, par contre, c’est d’assumer, au moins sur papier, les surcoûts qu’engendrera immanquablement la réforme. Entre les estimations les plus optimistes et les plus pessimistes, il y avait, voici de cela une année, près d’un milliard d’euros. C’est dire si on pouvait avoir l’impression d’y aller presque à l’aveugle… L’épure livrée discrètement – mais très sérieusement – aux décideurs par l’université de Namur a le mérite de clarifier les choses. En prenant en compte l’hypothèse de revalorisation salariale la plus logique, le pari laissera une facture additionnelle de minimum 120 millions d’ici une décennie. D’autres scénarios font aussi état d’un surcoût de 670 millions après quatre décennies de bons et loyaux services. Le tout alors que l’enseignement appelle son bailleur de fonds, on l’a dit, à financer d’autres coûteuses réformes.
La question aujourd’hui n’est évidemment pas de s’interroger sur l’opportunité d’améliorer la qualité de l’enseignement. La question est de savoir comment, à l’avenir, on va assumer les décisions du moment sachant que ledit bailleur de fonds est prisonnier de son incapacité à générer lui-même la moindre recette fiscale. La responsabilité politique commande de s’inquiéter dès maintenant d’un début de solution sous peine de devoir, demain ou après-demain, mendier un refinancement de la Communauté française que la Flandre pourrait faire payer cher, très cher, à ses amis francophones.
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