Poète des mots furibonds, Archibald Haddock est un emportement. L’ivresse de l’injure a fait du comparse de Tintin le vrai héros du monde d’Hergé. L’irruption de ce marin d’eau douce dans le supplément pour la jeunesse du Soir volé, au début de l’aventure du Crabe aux pinces d’or, va propulser la popularité de Tintin vers « des dimensions stratosphériques », pour reprendre l’expression de Maxime Prévost, tintinologue patenté de la Faculté des Arts de l’Université d’Ottawa.
Sa première apparition, le 2 janvier 1941, montre pourtant un homme à la dérive, un boit-sans-soif esclave de la bouteille, un capitaine honteux, incapable de tenir la barre du Karaboudjan, manipulé par les trafiquants d’opium à la solde de son premier lieutenant, Allan. Haddock pleure sa vieille mère dans un verre de whisky. Le capitaine est défait de l’intérieur, à l’image du journal Le Soir, dont la rédaction est contrôlée par la Propaganda Abteilung…